mercredi 11 février 2015

Szőke Tisza par Flora

Ki a Tisza vizét issza, vágyik annak szíve vissza...” dit la chanson. “Celui qui boit de l'eau de la Tisza, son coeur connaîtra le désir éternel du retour”...
Je revois mon père dans la barque qui traverse la rivière gonflée par la crue, de trois fois sa largeur habituelle. Il se penche et remplit le creux de sa main, pour boire quelques gorgées de l'eau “blonde”...

Tisza, la blonde... Je suis née sur ses bords sablonneux, près de la frontière yougoslave, en amont de Szeged où sa largeur atteint des dimensions respectables. Mon père possédait une parcelle de terrain dégagée des mauvaises herbes, dans la partie inondable, au delà de la digue, tout au bord de l'eau. Dans la pente plus élevée, il a implanté quelques rangées de vignes et de pêchers, tandis que plus bas, dans le creux, pommes de terre et maïs trouvaient de la place dans le sol ingrat. Presque tous les ans, les crues violentes du printemps inondaient la partie basse, emportant l'espoir de la récolte. Dès que la crue se retirait, mon père, avec l'obstination infatigable des gens de la terre, retournait le sol compact pour ressemer maïs et pommes de terre...
Depuis ma plus tendre enfance, je garde les sédiments des sensations de ces allers et venues au potager. Celles des débuts du printemps et des premiers rayons tièdes du soleil éveillant les bourgeons vaporeux des saules, saison où l'on commence à dégager les pieds des vignes de leur couverture de sable, jusqu'à l'automne où l'on va les “recouvrir” pour l'hiver... en passant par l'été torride où je traverse les 100 à 150 m de bosquet avec la cruche à la main pour aller chercher de l'eau potable à la fontaine, au-delà de la digue... ce bosquet de saules peuplé de mystères effrayants que je parcours à la hâte, m’imaginant le Petit Chaperon rouge...
J'ai le souvenir des crépuscules adoucis au-dessus de la Tisza, des concerts des grenouilles dans les roseaux et des escadrilles de moustiques qui partent à l'attaque… Tandis que nous poussons nos vélos chargés jusqu'en haut de la digue, avec une lassitude bienfaisante dans le corps, en accord intime avec le jour épuisé par la chaleur, je sens sous mes pieds nus le sable attiédi...
Rozsa Tatar

Rozsa Millet

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